Quand Agartha sort, Vald était loin d'être un illustre inconnu. Il avait déjà fait parler de lui à travers ses 4 mixtapes déjà sorties, dont les premiers NQNT. Bonjour avait été un énorme tube. Shoote un Ministre avait fait polémique. Selfie avait surpris avec les 3 versions du clip, de la plus mignonne sur Youtube à la plus explicite sur Pornhub. Bref, d'une manière ou d'une autre, le public avait au moins déjà vu le nom de ce rappeur alors parfois plus scruté comme un mec bizarre, marrant avec du buzz plutôt qu'un vrai artiste créatif et là pour durer.

Et la créativité, c'est justement ce qui saute aux yeux dès le début de la carrière de VALD. Pour son premier album, il fallait donc synthétiser tout cela en un projet cohérent. La pochette d'Agartha représente d'ailleurs assez bien le contenu du projet : Agartha est une mosaïque de sonorités différentes qui se rejoignent assez bien. Finalement, on peut se dire que l'album réussit assez bien à présenter toute la palette artistique d'un rappeur qui a plus d'une corde à son arc-artha (pas sûr de celle-là).

D'entrée, Acacia nous plonge dans l'univers déjà connu de VALD : franc-maçonnerie, pyramides, royaume sous-terrain et soucoupes volantes. "La plupart du temps, j’en ai rien à foutre de dénoncer". Mégadose, sur la surconsommation, vient pourtant apporter directement un propos beaucoup plus terre à terre que l’introduction. Cette dualité entre le personnage exubérant de VALD et les émotions réelles de l’artiste est parfaitement synthétisée dans Si j’arrêtais. Ce côté double face viendra rythmer en fait tout l’album. Je t’aime est une honnête déclaration d’amour et d’amitié, tout de suite suivie par le brutal Totem, un titre tribal aux airs de déclaration de guerre. LDS est un banger incompris. Ma meilleure amie sera, lui, le tube populaire de cet album. On prend la recette de Selfie et on la met dans l’album : une sonorité guillerette, gentille et mignonne pour un propos en fait bien moins grand public. Un texte avec une double lecture ; oui, on a bien compris qu’il ne parlait pas d’une fille.

Agartha clôture là sa première partie pour enchainer ensuite avec des titres plus proche de ce fameux monde souterrain : avec Neo, on repart dans la matrice et les mondes parallèles. Lezarman est un ovni, une sorte de générique de manga des années 80 sur un héro reptilien. Le Vald des NQNT est toujours bien présent. L’occasion de présenter Blanc, un titre aux apparences parodiques qui s’attaque finalement assez habilement au communautarisme. « Nique ta madre si ton seul combat, c’est ta couleur de peau ». Il est donc assez logique de retrouver la trap de viking, l'Afrotrap de blancs, Eurotrap, dans la continuité de Blanc sur l’album.

11 titres passés et le Vald cru parlant de femmes et de sexe comme sur Selfie ou Vie de Cochon reste assez discret pour le moment. La suite de l’album va nous servir avec successivement Petite Chatte, très subtile métaphore entre l’animal et la femme, puis Vitrine, en feat. avec Damso, sur la "triste vie" des prostituées. Ce trio se conclura avec un storytelling sur une virée en strip-club, Strip.

Reste alors à conclure l’album avec mélancolie. Kid Cudi fait écho à Si j’arrêtais, où l’on retrouve un VALD vulnérable, introspectif et dans le doute. Le surprenant Libelulle offre un dernier rebondissement avant de définitivement refermer les portes d’Agartha sur Dernier verre, une ballade douce et mélancolique.

Globalement, Agartha a donc rempli son cahier des charges : synthétiser, en un album, toute la palette artistique de VALD. En plus de cela, les tubes ont été au rendez-vous : Eurotrap, Vitrine, Ma meilleure amie et Mégadose. Ces titres, et cet album, marquent sans doutes l’arrivée de Vald dans la cours des rappeurs reconnus et effacent son étiquette de rookie. Succès grand public qui sera confirmé plus tard par l’énorme tube Désaccordé, sur XEU.

Depuis Agartha, VALD a sorti 2 albums solos, un album collaboratif avec Heuss L’Enfoiré, 3 mixtapes officielles dont 2 avec son label Echelon. Il est devenu l’une des quelques toutes hautes affiches du rap français. Si XEU est souvent cité comme étant son meilleur album, Agartha peut se targuer d’être probablement celui où VALD a été le plus créatif musicalement parlant. Une folie à peu près mise de côté depuis, ou du moins plus contenue. Aujourd’hui, Vald semble avoir trouvé la formule pour durer. Et ce n’est pas rien : Sullyvan est grand.